Je suis une farouche optimiste. Je suis de ceux qui pensent qu’il y a une solution à tout. Elle peut ne pas correspondre à ce que nous recherchons, mais elle existe. C’est ainsi que je vis ma vie, convaincue que si l’obstacle ne peut être surmonté, on doit pouvoir le contourner. Pourtant, il y a bien une situation qui me fait abdiquer et face à laquelle je demeure véritablement impuissante : la mort.
Moi, qui me veux un chantre de l’espoir, je dois me taire quand Thanatos frappe. Elle me noue les cordes vocales. Plus rien ne sort, pas un son, pas un murmure. La mort ébranle ma conviction du Tout est possible et conforte ma certitude de Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. Car quand justement, la vie s’en est allée, il est presque insensé de continuer d’espérer.
Récemment, deux femmes que j’admire beaucoup, des amazones comme on dit au Bénin, des fanm doubout aux Antilles, ou encore des diambar au Sénégal, ont perdu un être cher. J’ai dû me taire, par respect pour leur douleur, mais aussi parce que je n’avais rien à dire. J’aurais voulu les consoler, leur donner du courage, les rassurer quant à une solution, mais je n’ai trouvé ni les mots, ni la conviction de ce que je pourrais dire.
Peu importe le moment, le départ d’un proche est toujours douloureux. Le défunt laisse un vide impossible à combler. Ce n’est jamais le moment. L’être cher part trop jeune, pas assez vieux, encore plein de vie, alors qu’on avait des projets communs, alors qu’on avait promis se revoir sous peu, etc. Il part souvent à un moment où on s’y attend le moins. Mais en réalité, on ne s’y attend jamais. On n’a jamais assez profité de la présence de l’être cher, on ne lui a jamais assez témoigné notre amour, notre reconnaissance, notre joie de l’avoir. On ne l’a jamais assez bichonné. Etc.
Nous allons tous mourir, c’est le cours normal des choses. Proche ou lointain, ce jour se montrera. Personne n’y échappera. Mais ce sera hélas toujours douloureux pour ceux qui restent.
Je partirai un jour. Ce jour ne m’appartient pas et je n’ai aucun pouvoir sur lui. Cependant, je me plais à penser que si je peux choisir, je ne ferai pas exprès de partir dans la période de Noël. Mais, s’il devait arriver que je m’en aille à l’heure où certains commémorent la naissance du Christ et où la quasi-totalité de la planète fête en famille ou entre amis, je voudrais que mes proches sachent que je partirai avec le souvenir de tous les Noëls que nous avons célébrés ensemble.
Je ne ferai pas non plus exprès de partir à Pâques. De par ma foi, j’attends la renaissance comme suite de la passion. Pâques, retour à la vie, restauration, résurrection. Mais si cela devait arriver, que mes proches se réjouissent et soient dans l’allégresse car pour moi, ce sera la vie après la mort comme promise par le Christ.
Je ne ferai pas non plus exprès de partir à l’anniversaire d’un de mes proches. Je ne voudrais pas entacher ce jour pour toujours. Mais si ça devait arriver, je leur demande de me pardonner et d’avoir l’assurance que de là-haut, je veillerai sur eux comme un ange-gardien.
Quel que soit le jour où je m’en irai, dites à mes proches de ne point être tristes, mais plutôt de célébrer la vie. J’aurais vécu la mienne pleinement. J’aurais été heureuse. Je n’aurais aucun regret. Et si je peux encore des choses là-haut, je les y attendrai aux portes du paradis.
AJS
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